Le Soleil | Boom X : coulé dans le rock
CRITIQUE / En braquant les projecteurs sur la génération X, le formidable performeur Rick Miller réussit un véritable tour de force avec Boom X. Seul sur scène, il offre un enlevant condensé de 25 années, bâti sur une myriade de références politiques et sociales. Le tout porté par un savoureux cocktail de culture pop, tant visuel que musical.
Présenté pour la première fois en français au Carrefour international de théâtre, Boom X convie le spectateur dans un voyage temporel entre 1970 et 1995, des années marquantes pour le X Rick Miller.
L’homme de théâtre s’était au préalable intéressé à la génération de ses parents dans Boom. Un troisième chapitre scénique suivra avec Boom YZ, plus près de ses enfants. Voilà un travail de longue haleine pour l’artiste. Mais quelle sensible et réjouissante démarche.
Tous interprétés par Miller, quatre personnages servent de porte-voix à la génération X dans ce spectacle. Plus l’auteur lui-même, qui se livre au final aussi beaucoup. Et tous ceux — de Margaret Thatcher aux Muppets — qu’on verra sur l’écran et qu’il doublera au fil de la représentation. La description du Carrefour avance une centaine de personnages. On a perdu le compte.
Imitateur et chanteur talentueux, Rick Miller réussit à faire (re)vivre ses années de jeunesse en nous mitraillant de références : événements marquants, sports, films, jeux vidéos… Et ces chansons, véritables reines du spectacle, du disco au grunge en passant par le rock, le pop ou le rap.
Tour à tour, Rick Miller sera Bob Marley, Kiss, Michael Jackson, A-ha (dans un très réussi clin d’œil au clip animé de Take on Me), R.E.M., Public Enemy, Kurt Cobain (dans l’inoubliable concert acoustique de Nirvana sur MTV) et on en passe. Avec quelques accessoires, il se métamorphose. Pas besoin de plus, les écrans finissent de créer l’illusion en nous inondant d’images d’archives et d’information.
Plus que tout, la trame musicale de Boom X et la performance de son créateur nous happent. On en vient même à oublier de lire les faits historiques qui défilent sur l’écran.
Outre ses multiples références au baseball, on peut dire que la performance de Rick Miller est sportive. Notre homme est en nage à la fin du spectacle. On le serait à beaucoup moins. Passant d’un personnage à l’autre, d’une langue à l’autre (le spectacle est surtitré au besoin), d’un costume à l’autre, d’une chanson à l’autre, l’auteur, metteur en scène et interprète se démène. Mais avec beaucoup d’intelligence et une grande sensibilité.
Dans ce tourbillon très festif, de véritables enjeux son soulevés. L’homophobie, le racismes, l’envie de sortir du modèle légué par les baby-boomers, la génération précédente.
Le tout se déroule avec une énergie irrésistible. Nous sommes au théâtre, en distanciation, donc on se contente de taper du pied. Mais c’est le genre de spectacle qu’on voudrait voir debout, tout près de la scène, les bras en l’air, à reprendre en chœur les chansons rassembleuses qu’on entend.
Boom X est un show rock, finalement... Mais de théâtre.